Du bout de l’horizon accourt avec furie
Le plus terrible des ouragans
Le chène tient bon , le roseau plie.
Le vent redouble ses efforts,
Et fait si bien qu’il déracine
Celui de qui la tête au Ciel était voisine
Et dont les pieds touchaient à l’Empire des Morts.
Comme le chêne de La Fontaine, celui de la Nougarède a succombé aux rafales de vent de ce matin frileux d’octobre. Depuis des siècles, il était là, planté en bordure de l’Auzonnet. Il se souvenait des futaies de noyers à l’origine du nom de ce quartier. Il avait connu la verrerie Gilly première verrerie à utiliser le « charbon de terre » pour faire fondre la silice. Sans s’émouvoir, il avait assisté à la construction de la cité minière. Il avait même participé à la célébration de la victoire de la dernière guerre en arborant un drapeau tricolore qu’un jeune avait planté à son sommet.
Il connaissait tous les « Nougarédiens » comme s’auto-proclament les anciens qui ont vécu dans ce quartier. Toutes les générations d’enfants avaient grimpé un jour ou l’autre sur ses branches immenses. Les amoureux venaient s’embrasser sous son feuillage et les retraités appréciaient son ombre généreuse. Mais las, son tronc de 5,60 mètres de circonférence et de plusieurs dizaines de mètres de hauteur a été abattu par une rafale plus forte que les autres. Il s’est couché dans le lit de la rivière, craquant de tous ses membres et emportant avec lui tous ses souvenirs des siècles passés.
(Jean-Marc Garnier – Correspondant de Saint Jean de Valériscle)